L’IMPRÉVISIBILITÉ DES PRIX DE LA CONSTRUCTION

Visioconférence organisé par le CEAB pour ses membres le 18 avril 2023

En introduction, le président Cédric BOURGOIS indique que cette première soirée, destinée aux experts-architectes, doit permettre de faire le point sur l’évolution des prix de la construction (rapide ces dernières années), sur les outils utilisés pour pouvoir les estimer (index, bordereaux des prix unitaires, formules d’indexations, etc.) et sur la question des responsabilités des auteurs de projet par rapport aux augmentations des prix.

L’indice ABEX

L’architecte Michel DE KEYSER, membre de la commission ABEX, présente cet index :

  • Il s’agit d’un indice qui remonte aux années 1960 (mais l’ABEX a été fondée en 1933), qui permet de suivre l’évolution du prix de la construction d’un logement privé moyen (à savoir le coût nécessaire pour la construction d’un logement aujourd’hui).
  • Les prix sont données TVAC (la rénovation n’est pas envisagée).
  • Dans le passé, plusieurs types de logements étaient envisagés (maison d’avant 1914, petit immeuble à appartements, etc.). Aujourd’hui, il n’est plus envisagé qu’un seul type de bâtiment de logement (de 80 à 100 m2.)
  • Il est publié deux fois par an et reflète l’évolution des prix des 6 derniers mois. Malgré l’évolution rapide actuelle, cette périodicité constitue un bon compromis (compte tenu, notamment du fait que la démarche fonctionne sur base du volontariat).
  • Il a un caractère national (il n’indique pas les différences éventuelles entre les régions) et est utilisé dans différents domaines : assurance incendie, police RC Architectes, etc.
  • La commission qui le rédige est composée de 10 à 15 membres qui travaillent en présentiel : un bordereau de prix est soumis aux correspondants architectes (il n’y a pas de contacts avec les entreprises) qui le renvoient avec leurs modifications.
  • Ce bordereau, édité par l’ABEX (plus modeste que celui de l’UPA-BUA) est organisé sur base des corps d’états habituels (et pas sur le CCTB) mais suit les évolutions imposées par les obligations légales : évolution de la TVA, de l’isolation thermique, imposition du CSC, etc.
  • Les moyennes mathématiques sont corrigées (lissées) en tenant compte de l’évolution globale du pays (pondération par rapport aux différentes régions) et de l’évolution de la main d’œuvre. Des comparaison sont également effectuées par rapport aux pays limitrophes.
  • Ce document de références important, utilisé par les architectes, les entrepreneurs et certaines administration (TVA notamment) est régulièrement publié (environ tous les 3 ans) depuis 1985 (15 éditions successives), la dernière étant sortie en 2020 et la prochaine attendue pour la fin de l’année (dès sa création, l’UPA-BUA avait créé une « Bourse du Bâtiment » et des bordereaux avaient été publiés ultérieurement).
  • Il s’agit d’un document bilingue (français / néerlandais) qui reprend environ 1.700 postes pour lesquels sont données une fourchette : le prix bas correspond àde petites quantités ou des travaux très soignés, le prix haut à des grandes quantités ou pour des projets de rénovation. Il s’agit de prix usuels (HTVA), pour des projets de maisons unifamiliales relativement modestes ou de petits immeubles de rapport (il n’y a pas de différenciation entre les régions). Certains souhaiteraient parfois plus de précisions par rapport à ce qui est compris : des petits compléments pourraient éventuellement être envisagés mais en notes distinctes afin de ne pas nuire à la lisibilité générale.
  • Ces prix comportent toujours les fournitures et la main-d’œuvre (sauf parfois pour de petits postes, en variante, qui ne mentionnent que la fourniture).
  • L’équipe d’une dizaine de bénévoles rassemble, pendant un an des offres ou des comparatifs, envoyés par le réseau des membres de l’association (des différentes régions). Ces données sont intégrées dans un tableau Excel en regroupant les prix les plus hauts et les prix les plus bas. Après analyse (élimination des prix « anormaux » et comparaison de l’évolution par rapport aux prix de l’édition précédente), des moyennes sont établies (l’indice ABEX n’est pas pris en compte).
  • Pour les postes pour lesquels il n’y a pas de prix, on se base sur le prix des fournitures et une estimation de la main d’oeuvre.
  • En fonction de l’évolution des techniques et du marché, certains postes peuvent être supprimés et d’autres ajoutés au fil des éditions : c’est ainsi que la prochaine édition intégrera des postes relatifs aux matériaux biosourcéset recyclés. Les postes de cette nouvelle édition seront peut-être traduits en anglais et en allemand.
  • La structure du BPU est basée sur les corps d’état habituels (leCCTB s’est avéré trop complexe et trop changeant (mais le BPU correspond de façon générale à ses deux premiers niveaux).
  • Une version informatique, souvent réclamée, est à l’étude.
  • Certains ont tendance à prendre les prix hauts : cela peut s’expliquer par le fait de la durée entre la collecte des prix et la publication du BPU. Les retours des utilisateurs sont toujours les bienvenus (tout comme les envois de prix unitaires).
  • En conclusion, ; il est rappelé que ce type d’outil est destiné à des professionnels capables d’interpréter correctement les informations fournies. « Une estimation est basée sur la somme des incertitudes qui permet de s’approcherde la réalité ».
  • Formule de révision courante, qui offre la possibilité d’effectuer des calculs avec la formule de révision courante des prix du secteur de la construction, à l'aide des indices de salaires "s" et de matériaux "imat" (i2021 par exemple). Le prix ne peut être ajusté (à la hausse comme à la baisse) que si une formule de révision des prix a été incluse dans le contrat au préalable avec, par exemple 40% pour les salaires, 40% pour les matériaux et 20% de solde non révisable. Cette formule se base sur les indices au moment du contrat et au moment de la révision. Ces indices sont légalement ceux du mois précédent.
  • Qu’il ne s’agit pas d’un élément essentiel du contrat (sauf si les parties en décident autrement dans la convention).
  • Que l’auteur de projet a seulement une obligation de moyens (assistance et conseil), aussi bien en phase de conception que d’exécution (modifications éventuelles demandée par le maître d’ouvrage).
  • Que seul un dépassement substantiel (au-delà de 10 % (nouvelle construction à 15% rénovation) peut être qualifié de fautif.
  • Que la cause du dépassement de budget peut être étrangère à la responsabilité du concepteur. Juridiquement, l’obligation de réparer doit supposer un lien causal (exemple : erreur dans l’établissement du métré).
  • Qu’il faut tenir compte de la théorie des coûts différés de la construction : si le coût supplémentaire est inhérent au projet (mais avait été oublié dans le métré ou dans l’offre par ex.), il aurait de toutes façons dû être supporté.
  • Risque de responsabilité si le poste omis (ou la quantité sous-estimée) avait bel et bien été prévu dans le dossier d’exécution et que son prix aurait été raisonnablement inférieur à celui qui est réclamé ultérieurement.
  • Risque de raréfaction des matières premières qui entraine des augmentations de prix mais aussi des retards dans la fourniture (avec les frais que cela implique).
  • Pour les contrats antérieurs au 01/01/2023, il n’y a pas droit sauf si la possibilité a été prévue au contrat.
  • Pour les contrats postérieurs à cette date, l’article 5.74 du nouveau CC prévoit qu’il y a droit, sauf si cette faculté a été exclue (inversion des conditions).
  • Pour les marchés publics, il faut se référer à l’article 38 §9 de l’AR du 14/01/2013.
  • Importance de réaliser des plans d’exécution, des métrés précis puis de vérifier les offres (bien que les métrés et estimations ne soient pas imposée par l’Ordre. Légalement, l’architecte peut déléguer ces tâches non-monopolisées mais il reste le « chef d’orchestre »).
  • Prévoir une clause relative à l’estimation provisoire et aux limites de l’obligation de moyens.
  • Importance de clauses sur l’imprévisibilité des causes.

Le Bordereau des Prix Unitaires de l’UPA-BUA

Après avoir très brièvement présenté l’UPA-BUA (fondée en 1932), l’architecte Giulia MARVERTI, membre du comité des prix unitaires de cette association professionnelle, présente ensuite cet outil d’estimation :

  • Ce document de références important, utilisé par les architectes, les entrepreneurs et certaines administration (TVA notamment) est régulièrement publié (environ tous les 3 ans) depuis 1985 (15 éditions successives), la dernière étant sortie en 2020 et la prochaine attendue pour la fin de l’année (dès sa création, l’UPA-BUA avait créé une « Bourse du Bâtiment » et des bordereaux avaient été publiés ultérieurement).
  • Il s’agit d’un document bilingue (français / néerlandais) qui reprend environ 1.700 postes pour lesquels sont données une fourchette : le prix bas correspond àde petites quantités ou des travaux très soignés, le prix haut à des grandes quantités ou pour des projets de rénovation. Il s’agit de prix usuels (HTVA), pour des projets de maisons unifamiliales relativement modestes ou de petits immeubles de rapport (il n’y a pas de différenciation entre les régions). Certains souhaiteraient parfois plus de précisions par rapport à ce qui est compris : des petits compléments pourraient éventuellement être envisagés mais en notes distinctes afin de ne pas nuire à la lisibilité générale.
  • Ces prix comportent toujours les fournitures et la main-d’œuvre (sauf parfois pour de petits postes, en variante, qui ne mentionnent que la fourniture).
  • L’équipe d’une dizaine de bénévoles rassemble, pendant un an des offres ou des comparatifs, envoyés par le réseau des membres de l’association (des différentes régions). Ces données sont intégrées dans un tableau Excel en regroupant les prix les plus hauts et les prix les plus bas. Après analyse (élimination des prix « anormaux » et comparaison de l’évolution par rapport aux prix de l’édition précédente), des moyennes sont établies (l’indice ABEX n’est pas pris en compte).
  • Pour les postes pour lesquels il n’y a pas de prix, on se base sur le prix des fournitures et une estimation de la main d’oeuvre.
  • En fonction de l’évolution des techniques et du marché, certains postes peuvent être supprimés et d’autres ajoutés au fil des éditions : c’est ainsi que la prochaine édition intégrera des postes relatifs aux matériaux biosourcéset recyclés. Les postes de cette nouvelle édition seront peut-être traduits en anglais et en allemand.
  • La structure du BPU est basée sur les corps d’état habituels (leCCTB s’est avéré trop complexe et trop changeant (mais le BPU correspond de façon générale à ses deux premiers niveaux).
  • Une version informatique, souvent réclamée, est à l’étude.
  • Certains ont tendance à prendre les prix hauts : cela peut s’expliquer par le fait de la durée entre la collecte des prix et la publication du BPU. Les retours des utilisateurs sont toujours les bienvenus (tout comme les envois de prix unitaires).
  • En conclusion, ; il est rappelé que ce type d’outil est destiné à des professionnels capables d’interpréter correctement les informations fournies. « Une estimation est basée sur la somme des incertitudes qui permet de s’approcher de la réalité ».

Présentation de l’outil REVTOOLS et des indices de révision des prix

Après avoir signalé qu’il est prévu de fusionner le CCTB et le VHMC (flamand), l’ingénieur Maxime JANSSENS, responsable « Prix de revient et calcul des prix » de Buildwise (ex CSTC) a présenté ensuite les outils CPRO et REVTOOLS.

CPRO
Il s’agit d’un outil de gestion en ligne pour les entrepreneurs pour calculer les coûts et les assister dans la gestion administrative de leurs projets :

  • Il s’appuie sur une grande base de données de 600 postes régulièrement mis à jour.
  • Il calcule les devis selon les règles de l'art (diverses décompositions disponibles, possibilité d’une propre bibliothèque de matériaux) et importe ou exporte via Excel la totalité du devis ou des listes de matériaux.
  • Il permet d'analyser les résultats des projets sous forme de suivi financier pour identifier les différences entre les dépenses estimées et réalisées, la marge et les actions à entreprendre.
  • Il permet de facturer par états d’avancement, par tranches (% ou montants), travaux supplémentaires et fluctuation des prix.
  • Graphique évolution des indices qui permet de constater l'évolution des prix des matériaux, des salaires, de l'énergie, des produits & services, ... à travers des graphiques personnalisables.
  • Formule de révision détaillée 1 & 2, qui proposent de mettre au point une formule de révision détaillée correspondant aux spécificités des secteurs d’activités / matériaux utilisés par l’entreprise / postes de métré / …
  • Indexations des salaires par Commission Paritaire qui permet constater l'impact des indexations salariales sur les coûts du personnel, par commission paritaire (ouvriers & employés).

REVTOOL

Il s’agit d’un outil de suivi (mis à jour mensuellement) de l’évolution des prix dans le secteur de la construction.
L’outil en 4 étapes rapides :

Six autres feuilles de calcul contiennent toutes les données brutes servant aux calculs des feuilles mentionnées ci-dessus (et peuvent également être utilisées pour effectuer une analyse plus approfondie) : Maîtrise des pourcentages (pour vérifier rapidement des cumuls de remises ou d'augmentations de prix), Indices courants, Indices T.P. matériaux, Indices Grymafer (pour les fers à béton), Indices des produits & services et Compositions indices matériaux.

Ce programme peut être téléchargé et tous les indices se mettent à jour si on est connecté.
Beaucoup d’architectes utilisent cet outil. Une fonction, particulièrement prisée par les architectes permet d’analyser l’évolution moyenne des 6, 12, 36 ou 48 derniers mois et d’estimer l’évolution du budget en tenant compte de la durée estimée du projet.

La responsabilité de l’architecte en cas d’augmentation des prix

Christopher PEREXEMPEL, représentant de la compagnie d’assurance Protect, s’est ensuite attaché à préciser la responsabilité de l’architecte lorsqu’il est confronté à des réclamations du maître de l’ouvrage à propos des dépassements de budgets qui ne sont pas nécessairement dus à l’auteur de projet : Covid 19, guerre en Ukraine, faillite de l’entrepreneur (avec les surcoûts consécutifs à l’interruption et à la reprise du chantier), etc.

Au sujet du budget, il a rappelé :

Certaines circonstances peuvent impliquer l’architecte :

En ce qui concerne les augmentations de prix, il faut vérifier si l’entrepreneur est bien fondé à les demander :

Tout cela implique de prendre une série de précautions.

Conclusion

Cette première soirée sera suivie, le jeudi 25 mai 2023, par une soirée de discussion, en présentiel (en cours de préparation) qui demandera une implication active des participants et qui se tiendra à Wavre.

Michel PROCES

24/04/2023